Répression de la libéralisation : L’UE menace d’intenter une action en justice contre les Pays-Bas au sujet du contrat avec les NS pour le réseau ferroviaire principal
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La Commission européenne menace de poursuivre les Pays-Bas dans le cadre d’une affaire de libéralisation historique pour avoir attribué directement un contrat ferroviaire à l’opérateur NS, soutenu par l’État, au lieu de l’ouvrir à la concurrence. Les Pays-Bas ont maintenant deux mois pour répondre et prendre des mesures correctives. S’ils ne le font pas, la Commission peut porter l’affaire devant la Cour de justice de l’Union européenne.
La Commission européenne (CE) exhorte les Pays-Bas à se conformer aux règles de l’UE relatives à l’attribution directe de contrats de service public (CSP) pour le transport ferroviaire de passagers. Jeudi, Bruxelles a décidé d’émettre un « avis motivé » – un avertissement formel de l’UE avant une action en justice – aux Pays-Bas pour n’avoir pas appliqué correctement le règlement (CE) n° 1370/2007 relatif aux obligations de service public (OSP) dans le domaine des transports publics de voyageurs par chemin de fer et par route.
Selon Bruxelles, « une concurrence régulée sur le marché ferroviaire est essentielle pour offrir aux passagers des services plus attrayants et innovants à moindre coût, sans compromettre les services publics ».
Il s’agit d’un développement important en termes de libéralisation du rail dans l’UE car, selon les lobbyistes ferroviaires ALLRAIL, c’est la première fois que la CE met officiellement en garde un pays pour l’attribution directe d’un contrat ferroviaire national entier sans concurrence. Bien que l’UE ait déjà signalé des problèmes liés à des contrats publics dans d’autres pays, ce cas particulier se distingue par le fait qu’il couvre la quasi-totalité du réseau ferroviaire néerlandais (95 %), ce qui en fait l’un des cas les plus importants de ce type.
À contre-courant de la libéralisation
La notification intervient après que la Commission a envoyé une lettre de mise en demeure le 14 juillet 2023 parce que les Pays-Bas avaient décidé d’attribuer le contrat de concession pour les services de transport ferroviaire de passagers pour la période 2025-2033 directement à l’opérateur historique NS. En vertu du règlement (CE) n° 1370/2007, les Pays-Bas auraient dû suivre une procédure de passation de marchés publics.
Malgré les objections de la Commission, le contrat a été attribué à NS le 21 décembre 2023. Le 13 mars 2024, la Commission a envoyé une mise en demeure écrite supplémentaire concernant la portée des obligations de service public dans ce contrat. « Les obligations de service public au titre du règlement (CE) n° 1370/2007 doivent garantir qu’un opérateur fournit des services publics de transport de passagers dans l’intérêt général, même si ces services ne sont pas dans son intérêt commercial », écrit la Commission européenne.
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La Commission a estimé que les Pays-Bas n’avaient pas suffisamment analysé les services de transport qui peuvent être offerts par les acteurs du marché dans des conditions commerciales de libre accès. « La Commission a donc décidé d’envoyer un avis motivé aux Pays-Bas. Les Pays-Bas ont maintenant deux mois pour répondre et prendre les mesures nécessaires. Dans le cas contraire, la Commission pourrait décider de porter l’affaire devant la Cour de justice de l’Union européenne ».
La CE ne dit rien sur ce que pourraient être « les mesures nécessaires », mais il semble très probable que la CE exhorte les Pays-Bas à lancer une procédure d’appel d’offres public pour le réseau ferroviaire principal, avec effet rétroactif, à savoir jusqu’au 1er janvier 2025 inclus.
Syndicat des chemins de fer : La CE se trompe et est dans l’erreur
Selon FNV Spoor, la branche ferroviaire du syndicat néerlandais FNV, les Pays-Bas ne doivent pas s’inquiéter en cas de procès. Le syndicat affirme que la CE ne connaît pas ses propres lois et règlements et/ou les interprète et les applique de manière erronée.
Le règlement révisé sur les obligations de service public (OSP) stipule que « les États membres, comme le reconnaît la Commission européenne, disposent d’une liberté considérable pour conclure des contrats de service public ». Voir aussi, entre autres, l’arrêt Andersen de la Cour de justice de l’UE. Selon cet arrêt, la Commission ne peut intervenir qu’en cas d’erreur manifeste. Il s’agit là d’un seuil très élevé ».
En outre, selon FNV Spoor, chaque État membre « dispose également d’une grande marge de manœuvre pour déterminer la taille d’une concession. La taille de la concession n’affecte pas la manière dont elle peut être attribuée (de gré à gré ou par appel d’offres). De plus, une concession peut explicitement inclure des lignes déficitaires et des lignes rentables. L’article 2a du règlement OSP stipule littéralement que cela « inclut la possibilité de combiner des services couvrant les coûts avec des services ne couvrant pas les coûts ».
Pas d’obligation de consultation du marché
En substance, ils soutiennent que les règles de l’UE permettent aux pays de décider de la taille d’un contrat ferroviaire et de regrouper les lignes rentables et non rentables, sans affecter la question de savoir s’il doit faire l’objet d’un appel d’offres public ou d’une attribution directe. De plus, FNV Spoor affirme que la Commission européenne utilise des règles juridiques erronées, car les contrats ferroviaires ne nécessitent pas de prouver la défaillance du marché ou d’organiser une consultation du marché.
« Il n’est pas nécessaire de procéder à une consultation du marché ou de prouver l’existence d’une défaillance du marché. La Commission, dans sa position divergente, s’appuie sur un précédent juridique erroné : le cadre général du DAEB ne s’applique pas dans ce cas (comme dans l’arrêt SNCM, qui concerne le transport maritime) ; c’est le cadre exclusif des OSP qui s’applique. Dans l’arrêt Andersen, la Cour de justice de l’UE a explicitement déclaré que la preuve d’une défaillance du marché n’est pas nécessaire pour les contrats d’OSP – tout au plus peut-elle être utile.
Lire la position complète de FNV Spoor concernant le HRN ici.
Cet article a été publié à l’origine dans SpoorPro , la publication sœur de RailTech .
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