Espagne : Adif investit 24 milliards d’euros en 4 ans et se dote d’un nouveau patron
L’entreprise espagnole Adif et sa filiale spécialisée dans les véhicules à grande vitesse, Adif AV, ont annoncé qu’elles investiraient 24,1 milliards d’euros au cours de la période 2022-2026. C’est presque trois fois plus que le PIB de Monaco. Plus de la moitié de cette somme sera consacrée au réseau classique, aux trains de banlieue et au fret, tandis que les 50 % restants auront déjà été réalisés à la fin de l’année 2024. Un nouveau chef d’entreprise supervise désormais les attributions.
Les entreprises soutenues par l’État verseront le reste de l’argent au cours des deux prochaines années et l’utiliseront pour des centaines de projets en cours et prévus afin de rénover le réseau ferroviaire espagnol et ses gares. Il s’agit notamment de passer aux technologies les plus récentes, d’augmenter la capacité et d’achever le développement du plus grand réseau à grande vitesse d’Europe.
Les investissements sont en grande partie conformes au programme d’activité 2022-2026 d’Adif et d’Adif AV, qui a été mis à jour en 2024. Soutenant la stratégie indicative de l’Espagne, le plan ferroviaire à long terme du pays, et signé par le ministre des transports, le document détaille le programme d’investissement visant à placer les voies ferrées de l’Espagne au cœur de son réseau de transport.
Adif donne la priorité au rail conventionnel ?
L’Adif a tenu à souligner que plus de la moitié des investissements ont été alloués au réseau conventionnel espagnol pour les trains de banlieue et les trains de marchandises. C’est plus que ce qui a été dépensé pour le train à grande vitesse. La modernisation des différents corridors de lignes ferroviaires conventionnelles et le renouvellement des systèmes de signalisation, d’électrification et de communication du réseau ont été une priorité.
Outre les investissements dans les différents nœuds ferroviaires de banlieue, l’argent est utilisé pour donner un coup de pouce au fret. Il s’agit notamment d’adapter les lignes au trafic des autoroutes ferroviaires, de rénover et de numériser les centres logistiques tels que Vicálvaro, Valladolid et Can Tunis, et de relier le rail aux ports, comme ceux de Sagunt, Castellón et La Corogne.
Investissement dans la grande vitesse
En ce qui concerne la grande vitesse, Adif AV investira 12 milliards d’euros supplémentaires entre 2022 et 2026 pour poursuivre l’expansion du réseau à grande vitesse et renforcer celui qui est actuellement en service et qui, avec ses 4 000 km, est le plus grand d’Europe. Sur les 12 milliards d’euros, environ 7 milliards devraient être dépensés d’ici à la fin de 2024. Une grande partie de l’argent sera consacrée aux corridors à grande vitesse en cours de développement, notamment les lignes vers la Cantabrie, le Pays basque, la Navarre, l’Estrémadure et Almería.
Il servira également à améliorer la connectivité du réseau en service, y compris les connexions transversales telles que le contournement d’Olmedo et la liaison avec l’aéroport de Madrid-Barajas, par exemple. En outre, la rénovation de la ligne à grande vitesse Madrid-Séville est également prévue.
Où va l’argent et d’où vient-il ?
Presque tous les investissements se sont concentrés sur les deux corridors de transport européens, le corridor atlantique et le corridor méditerranéen, des sections importantes du réseau transeuropéen de transport (RTE-T). Ceux qui font partie du corridor atlantique s’élèvent à plus de 4,8 milliards d’euros pour la période de cinq ans ; ceux du corridor méditerranéen, à plus de 5,5 milliards, et ceux des sections communes aux deux corridors, à plus de 2 milliards.
Si l’État espagnol a assuré une grande partie du financement, l’UE devrait prendre en charge plus de 1,3 milliard d’euros des investissements, le mécanisme de relance et de résilience de l’Union finançant 4 milliards d’euros supplémentaires. Afin d’attirer davantage de financements de l’UE, qui sont liés à des engagements de libéralisation du rail, Adif et Adif AV prévoient également de maintenir le niveau actuel des tarifs jusqu’en 2026.
Investissement majeur, révision majeure
Le réseau ferroviaire espagnol, qui est le plus grand système ferroviaire à grande vitesse d’Europe et le deuxième au monde après la Chine, a fait l’objet d’une refonte importante ces dernières années, à la fois en termes de direction et de leadership politique.
Tout d’abord, la popularité des voyages en train s’est considérablement accrue au cours des cinq dernières années. Certains attribuent cette évolution à la récente libéralisation du réseau. Les voies espagnoles ont été ouvertes à la concurrence pour la première fois en 2020, l’entreprise publique Renfe devant désormais rivaliser avec de nouveaux venus à petit budget comme Iryo et le français Ouigo. Ce changement a eu lieu dans le contexte d’un scandale politique majeur, d’une baisse de confiance du public dans les principaux organismes de transport du pays et d’un nombre croissant de perturbations ferroviaires.
Fini l’ancien, place au nouveau
En fait, le ministre espagnol des transports a dû licencier quatre hauts responsables des transports au cours des derniers mois, dont le président d’Adif, en raison de leurs liens avec l’affaire dite « Koldo ». Ce scandale concerne Koldo García, un ancien conseiller ministériel qui aurait obtenu des contrats pour le masque COVID-19 en échange de commissions illégales.
Le gouvernement a déclaré que le licenciement du chef d’Adif était davantage lié à une série de perturbations ferroviaires survenues cet été, notamment des déraillements, des pannes de voies et des retards, qui ont été particulièrement graves dans des zones à forte circulation comme Barcelone et Madrid. Aujourd’hui, avec le nouveau patron d’Adif, Luis Pedro Marco de la Peña, à la barre, l’entreprise espère sans doute tourner la page d’une année riche en investissements, mais difficile pour les chemins de fer espagnols.
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